Journaliste sportif spécialisé dans le football, Arnaud Ramsay a travaillé pour plusieurs médias prestigieux depuis le début de sa carrière (France Football, France Soir, le JDD...). Il s'est également illustré en écrivant plusieurs biographies de joueurs. Pour Foot sur 7, ce natif de Paris évoque la situation de Laurent Blanc au PSG, le mercato, sa relation particulière avec Nicolas Anelka ainsi que son parcours professionnel. Entretien.

Foot sur 7 - Vous avez écrit le livre « Laurent Blanc, la face cachée du président », paru aux Éditions Fetjaine, en 2012. Quel avenir imaginez-vous pour Laurent Blanc au PSG ?

Arnaud Ramsay - Pour commencer, je tiens à dire que cet ouvrage n'était pas une charge contre Laurent Blanc, qui est un personnage taiseux. Mon idée n'a pas changé à propos de lui : c'était un immense joueur, un véritable taulier de l'équipe de France avec Didier Deschamps. Ce dernier est un patron sur et en dehors du terrain. Cela n'est pas le cas de Blanc, qui manque de charisme. D'ailleurs, il a longtemps « galéré » avant qu'on ne lui tende la main. Pendant une longue période, il s'est cassé les dents. Le vrai entraîneur de terrain au PSG, c'est son adjoint : Jean-Louis Gasset. Évidemment, Blanc est un choix par défaut pour QSI. Après, j'espère tout de même qu'il gagnera des titres. Mais son avenir dans la capitale ne s'annonce pas très long, il est spectateur de ce qu'il se passe. C'est un terrien, un provincial, je ne suis pas sûr qu'il soit fait pour la vie parisienne. Il sera jugé sur ses résultats. Si le PSG parvient en demi-finale de la Ligue des Champions, décroche à nouveau le titre de champion de France, il sera compliqué de l'évincer. En réalité, Blanc a tout à gagner au PSG, il peut se refaire une virginité après l'échec des Bleus à l'Euro 2012. C'est une carte de visite que les Qataris lui offrent.

Les médias français seront-ils aussi indulgents avec Blanc qu'Ancelotti ?

Nous sommes dans une ère de bashing (lynchage médiatique, Ndlr). Pierre Ménès a volé au secours de Blanc à plusieurs reprises. Ancelotti était meilleur face à la presse, il a su séduire l'auditoire. Son CV est nettement moins resplendissant que celui de l'Italien. De plus, Blanc sait moins « mentir ». Ancelotti a tout compris au niveau des médias. Parfois, il mentait car il était obligé, son petit sourire en disait long. Blanc est un peu maladroit, il est trop franc, trop gentil et pas assez manipulateur. Par exemple, il ne sait pas faire de langue de bois avec le sourire comme Deschamps. Il est en décalage avec le Paris bling-bling d'aujourd'hui. Il me fait penser a Pierre Richard parfois, il manque clairement d'autorité.

« Thauvin donne une image ridicule, son exemple est catastrophique »

Vous avez suivi le mercato pour le JDD cet été. A quelques jours de la fermeture du marché, qu'en retiendrez-vous cette année ?

La République des joueurs, avec les cas Gareth Bale et Florian Thauvin. Ce dernier finira par quitter Lille, il aura ce qu'il veut. Mais ce jeune homme de 20 ans donne une image ridicule, son exemple est catastrophique. En signant à Marseille, il pourrait imploser. Malheureusement, dans ce type de bras de fer, le joueur finit par avoir gain de cause... Toutefois, s'il réussit à enflammer le Vélodrome, il pourrait vite se faire pardonner.

Vous êtes un proche de Nicolas Anelka, qui n'est pas réputé pour apprécier les journalistes. Comment l'avez vous connu ?

Lorsque je travaillais à France Football, je faisais quelques piges en parallèle pour le magazine XL. On m'avait proposé de passer 24 heures dans la vie d'un futur joueur professionnel. A l'époque, Anelka était apprenti stagiaire au PSG. Il était déjà exactement comme il est aujourd'hui. Je me souviens de lui avec sa petite moustache, il n'avait pas encore le permis de conduire. Il avait un truc à part. On a toujours entretenu le lien, je l'ai encore fréquemment au téléphone. Je connais même sa famille. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, il n'est pas haineux avec les médias. Anelka n'a jamais changé, je n'ai pas eu besoin de « l'apprivoiser ».

ramsay arnaud

En août 2003, Nicolas Anelka vous avez confié à l'occasion d'un entretien pour Paris Match : « Que Santini s'agenouille devant moi, s'excuse d'abord, et après je réfléchirai si je reviens chez les Bleus ». Il vous avait dit de l'écrire. N'avez-vous pas essayé de le dissuader d'éviter ce genre de propos pour le bien de sa carrière ?

A cette époque, il jouait à Manchester City. C'était un sujet intimiste, dans lequel cette fameuse phrase s'est retrouvée au cœur de l'article. C'était maladroit, mais c'était une sorte de second degré qui est mal passé à l'écrit. Santini, alors sélectionneur de l'équipe de France, réclamait des excuses publiques car Anelka avait refusé une sélection. Quoi qu'il en soit, je ne l'ai pas influencé, je sais où est ma place.

« Il n'y a pas de place pour deux quotidiens sportifs en France »

Comment avez-vous débuté dans le journalisme ?

C'est vraiment une vocation, je ne suis pas un footballeur frustré. Dès l'âge de 13 ans, j'ai décidé de faire ce métier. J'ai écrit un journal : « La belle feuille ». Mon père le corrigeait, ma mère l'imprimait au bureau et je le démarchais en faisant du porte-à-porte. J'ai eu la chance de grandir à Boulogne-Billancourt, tout près du Parc des Princes. J'ai ainsi pu réaliser beaucoup d'interviews de joueurs du PSG, comme Dominique Rocheteau ou Joël Bats. J'ai ensuite travaillé pour l'émission de la Cinquième L'Esprit du Sport entre 1995 et 1997, puis j'ai enchaîné avec l'émission La Planète Ronde. En 1999, j'ai intégré la rédaction de France Football.

Pourquoi avoir démissionné de France Football en 2005 ?

J'avais l'impression d'avoir fait le tour, de m'émousser un peu et j'avais besoin de faire un petit pas de coté. J'ai rebondi au JDD en 2005, qui est un hebdomadaire généraliste. Certains m'ont conseillé de ne pas partir car j'avais la sécurité d'un CDI à France Football, mais j'avais confiance en moi. Au JDD, je suis devenu pigiste permanent. Je suis quelqu'un qui croit beaucoup au destin et aux aventures.

Vous avez participé à l'aventure d'Aujourd'hui Sport et Le 10 Sport. Comment expliquez-vous que ces journaux ne soient pas restés plus longtemps dans les kiosques ?

Déjà, le monde de la presse va très mal. Ensuite, il n'existe pas de véritable culture foot en France. Aujourd'hui Sport n'a été créé qu'en réaction au lancement du 10 Sport. A l'heure actuelle, L'Equipe a su conserver son monopole : c'est le propre des leaders d'opinion. En 2013, il n'y pas pas de place pour deux quotidiens sportifs en France. On verra si l'Euro 2016 permet de faire évoluer cette situation.

Vous avez écrit plusieurs biographies de footballeurs, dont celles de Youri Djorkaeff et Bixente Lizarazu. Pourquoi avez-vous opté pour eux et comment s'est effectué la collaboration ?

J'ai été approché par les éditions Grasset dans la perspective du Mondial 2006. J'ai alors proposé d'écrire un livre sur Djorkaeff, qui terminait sa carrière aux USA. J'ai passé dix jours avec lui à New-York. J'ai écrit l'ouvrage à la première personne, j'étais son porte plume. Initialement, je devais faire Lizarazu. J'ai ensuite pu « récidiver » avec ce dernier pour un bouquin d'entretiens. J'ai passé une semaine avec lui en Allemagne, à Munich. Il s'est beaucoup impliqué dans la réalisation de ce projet.

Avec quels autres joueurs aimeriez-vous collaborer à l'avenir ?

J'ai un peu l'impression d'avoir fait le tour avec le foot. Mais pourquoi pas un entraîneur, José Mourinho par exemple.

Clôturons cet entretien par un petit jeu de pronostics.

Qui sera Champion de France ? : le PSG

Meilleur buteur de Ligue 1 : Falcao, avec 29 buts

La surprise de la Ligue 1 : Guingamp

Vainqueur de la Ligue des Champions : Chelsea ou le Bayern Munich

Ballon d'Or : Ribéry

L'équipe de France se qualifiera-t-elle pour le Mondial 2014 ? Je l'espère. Hélas, il faudra passer par les barrages. La France n'est plus le cannibale du football mondial, comme elle a pu l'être à un moment donné. Les Bleus ne peuvent pas manquer une Coupe du Monde dans le pays du football...