Aussi surprenant que cela puisse paraître, depuis ces derniers jours, la débâcle sportive des Bleus semble avoir été reléguée au second plan, à cause du coup de sang de Samir Nasri, dont le cas personnel commence à prendre de plus en plus d’importance. En effet, l’accrochage verbal entre le milieu de terrain et un journaliste, en zone mixte, continue de faire jaser, et bien peu sont ceux qui osent trouver des circonstances atténuantes au champion d’Angleterre.
Ainsi, au micro de TF1, Tony Parker affirmait, à juste titre, que ce genre d’écart de comportement, sur ou en dehors du terrain, ne restait jamais impuni en NBA, où toute incartade est lourdement sanctionnée par une amende de plusieurs milliers de dollars. Si le basketteur n’a donné son opinion qu’en raison d’une question posée sur le sujet, on peut tout de même reconnaître la logique qu’il y ait à connaître le point de vue de l’un des sportifs les plus respectés de l’hexagone.
Certains dirigeants de clubs de Ligue 1 se sont, quant à eux, montrés beaucoup plus offensifs en évoquant le traitement qu’ils auraient réservé à Samir Nasri dans cette situation. Michel Seydoux, le président du LOSC, a affirmé sur RTL qu’il aurait convoqué le joueur, « à moins qu'il y ait une provocation, et si les éléments sont à sa charge, il est évident que ça sera un cas très grave et je pense que nous ne pourrions pas le garder. Je pense que le comportement et la bonne éducation, c'est indispensable ». Quant à Jean-Louis Triaud, le président des Girondins de Bordeaux, il refuse de croire que Laurent Blanc ait été incapable de gérer Nasri : « Quand vous avez affaire à une bourrique, vous avez beau être très doué dans la gestion, vous n'allez pas transformer les hommes. » Elégant.
Mais dans le bal des réactions, on ne s’attendait pas forcément à ce que le cas de Nasri fasse irruption dans la sphère politique. Pourtant hier, la ministre des Sports, Valérie Fourneyron, a déclaré, outrée, sur Canal+ : « S'il y a des attitudes qui doivent être sanctionnées, il faut le faire ». Le tout est de savoir de quelle manière pourrait-on sanctionner un joueur qui, en zone mixte, aurait répondu à une provocation, certes de manière virulente, mais en dehors du cadre d’un match de football, puisque les faits se sont déroulés en coulisses. Serait-ce une sanction financière ? Sportive, en l’écartant de la sélection ? Et pourquoi pas judiciaire, histoire de satisfaire pleinement ceux qui réclament aujourd’hui que la tête de Nasri soit clouée sur un piquet ?
Face au tollé déclenché, et à cette avalanche de commentaires plus indignés les uns que les autres, Bakary Sagna, ancien coéquipier de Samir Nasri à Arsenal, et actuellement en convalescence au Qatar, a tenu à défendre son ami dans les colonnes de l’Equipe : « Samir, je le connais, quand quelque chose ne lui plaît pas, il le dit... Il a eu une réaction violente, mais vous (ndlr : les journalistes) avez également votre part de responsabilité. Parfois on est bon, parfois moins, mais ce sont toujours les mêmes qui prennent. Et je m'inclus dedans. Quand la presse attaque quelqu'un, elle ne le lâche pas. » Et même s’il ne cautionne pas les insultes proférées, le Gunner a tenu à rappeler le climat dans lequel Nasri a été contraint d’évoluer, tout en évoquant la réaction d’humeur d’un homme sous pression : « Je n'excuse en rien ses propos, mais avec l'énervement du match, tout ce qui a été écrit sur lui, ce n'était peut-être pas le moment de le titiller. Il aurait dû garder son calme, mais c'est que ça lui pesait. L'Euro n'avait même pas encore commencé que la presse le critiquait déjà. Péter un plomb, parfois, ça arrive. Moi-même, ça m'est arrivé avec Zabaleta, mais ce n'était pas moi. Des fois, on redevient humain... Ce qui est regrettable, c'est qu'au final, ça donne une mauvaise image de nous, de l'équipe de France et de la presse pour rien. Ça gâche la compétition. Tout ça était évitable. »
Bakary Sagna semble donc avoir clairement choisi son camp. Et si Samir Nasri avait l’impression d’être l’homme le plus honni de la France du football, en digne successeur des Domenech et des Anelka, qu’il se rassure, il peut au moins compter sur ses amis.